Travaux de restauration et fouilles archéologiques 2012 de la Petite PérottePar Vincent ARD Depuis 2009, un important projet de mise en valeur et de protection du patrimoine mégalithique du Nord-Charente est mené conjointement par le Pays du Ruffécois, la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) de Poitou-Charentes, le Club Marpen et des archéologues spécialistes de la question. Il s’accompagne d’une exposition itinérante, visible cet été à la Maison du Patrimoine de Tusson, de conférences publiques et d’un bilan sanitaire des monuments conservés sur le territoire. Dans le Ruffecois, la concentration en mégalithes, dolmens ou tumulus, est en effet l’une des plus importantes de France. Rappelons que ces monuments correspondent à des tombes de la fin de la Préhistoire (période néolithique), édifiées il y a plus de 6000 ans, près de deux millénaires avant les premières pyramides d’Egypte… L’un des plus remarquables, le dolmen de la Petite Pérotte, est apparu comme une priorité dans le programme de restauration engagé en 2012, du fait de la fissuration de la majorité des piliers en pierre qui maintiennent l’imposante la dalle de couverture, d’un poids supérieur à 20 tonnes. Une opération de consolidation-restauration a donc été réalisée en 2012 par l’entreprise des Compagnons de Saint-Jacques, supervisée par le service des Monuments Historiques de la DRAC. Elle a été précédée d’une campagne de fouille en août 2012 destinée à préciser le plan du dolmen, préalable nécessaire à une restauration réussie et scientifiquement valable. Au cœur d’une vaste nécropole néolithique, comportant une forte densité de monuments sur les communes de Luxé, Fontenille, Ligné et Tusson, les deux Pérottes sont connus de longue date. Contrairement au dolmen de la Grosse Pérotte, dont l’exploration en grande partie clandestine est relatée par A.-F. Lièvre1, aucune fouille de la Petite Pérotte n’avait jamais été menée.
Pour préparer l’intervention archéologique, une prospection géophysique a été réalisée par des chercheurs de l’université de La Rochelle en fin d’année 2011. Cette méthode, qui s’appuie sur les propriétés magnétiques et la résistance des sols, a permis de montrer que les deux Pérottes sont bien deux monuments indépendants et qu’aucune structure annexe (fossés ou carrières) n’existe à proximité immédiate. La fouille archéologique menée cet été, par une équipe d’une dizaine de bénévoles venant de toute la France, avait trois objectifs principaux. Il s’agissait d’apporter les premiers éléments sur l’architecture du monument, totalement indéchiffrable avant notre intervention, en cherchant à préciser le plan de la chambre sépulcrale sous le dolmen, l’emprise du couloir d’accès à celle-ci et la forme originelle du tumulus (monticule de pierres) qui recouvrait jadis intégralement la chambre et le couloir. L’obtention de ces données était destinée à orienter au mieux la restauration du monument, tout en nourrissant la réflexion scientifique sur les dolmens régionaux dont peu ont fait l’objet de recherches employant les méthodes scientifiques et les questionnements les plus récents. Nous souhaitions également rechercher des dépôts humains conservés pour aborder la question du fonctionnement funéraire de ces monuments, que l’on sait complexe et prolongé sur parfois plusieurs siècles. Enfin, cette fouille s’inscrit dans la continuité des recherches que je mène avec mon équipe dans le Nord-Charente et qui cherche à mieux comprendre les liens entre le monde des vivants et le monde des morts au Néolithique (4500-2200 avant notre ère). Ces recherches ont été engagées lors des fouilles de l’habitat de Bellevue à Chenommet située près de la nécropole de Chenon, le long de la vallée de la Charente, au nord de Mansle. Les résultats de la campagne de fouille 2012 ont dépassé nos espérances du fait de l’excellente conservation du monument, en dépit des passages répétés sur le site depuis des siècles... Sous le dolmen, la chambre funéraire est délimitée par des piliers en calcaire local, parfaitement façonnés pour s’ajuster les uns aux autres. Ces piliers mesurent plus de deux mètres de hauteur, dont plus d’un mètre était encore sous terre avant la fouille. Des fragments des piliers manquants et une partie d’un dépôt funéraire néolithique en place sur un dallage en pierre ont été découverts à la base du comblement de la chambre. Ce niveau funéraire, en cours d’étude, comprenait au moins six défunts, comportant encore des ossements en connexion, et un gobelet en céramique décoré. Dans le couloir, orienté vers l’est, de nombreux vestiges ont été recueillis (silex, céramique, parure, ossements humains), bien que des interventions clandestines et la pousse des arbres aient fortement perturbé cette zone du monument. La mise en évidence de deux parements concentriques en pierres sèches maintenant la masse de pierre du tumulus, conservés juste sous la terre végétale, sur près d’un mètre de haut pour le parement le plus interne, est une autre découverte majeure. L’ensemble de ces éléments est en cours d’analyse actuellement et fera l’objet d’une publication dans l’avenir. Le repositionnement des fragments retrouvés dans la chambre a permis la restauration de deux piliers du dolmen jusqu’alors invisibles. Pour palier la fragilité des piliers fissurés, sans pour autant les remplacer, un pilier central artificiel en pierre, masqué par le rebouchage quasi complet de la chambre, a été édifié et soulage désormais les piliers néolithiques de manière à conserver ce monument multi-millénaire pour les générations futures. La fouille s’achèvera l’été prochain par la fin de l’exploration du couloir et la remise en état définitive du site. Une présentation détaillée et en image des résultats de ces fouilles 2012 sera effectuée à la mairie de Fontenille le 22 février 2013, à 18h30. Note |
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